Pour Donald Trump, la première étape consiste toujours à étiqueter sa victime.

Pourquoi Donald Trump traite son adversaire de «boulette de viande»

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De «Sleepy Joe» à «Crazy Nancy» en passant par son petit dernier, «Meatball Ron», l’ancien président ne manque pas d’imagination quand il s’agit de décridibliser ses adversaires.

Donald Trump a une âme de poète. L’ancien locataire de la Maison Blanche a forgé sa légende sur les images fleuries qu’il utilise pour décrire le reste du monde.

Ron DeSantis, son adversaire potentiel pour la présidence en 2024, peut en témoigner: selon un récap’ établi ce week-end par le New York Times, le gouverneur de Floride a écopé de pas moins de trois surnoms différents. «DeSanctimonious», «Shutdown Ron» ou, must du must, «Meatball Ron».

Que son talent littéraire soit souligné par le prestigieux quotidien américain n’a pas flatté l’ego de Trump. Lundi soir, le président-poète s’est épanché sur sa plateforme, Truth Social, pour fustiger l’article. No, il ne passe pas une «grande partie de son temps» à trouver le qualificatif idéal pour «DeSanctimonious». Fake news.

Des références très subtiles (ou pas)

Que Donald Trump perde beaucoup de temps ou non à dénicher les surnoms de ses victimes, il faut avouer qu’ils ne manquent pas d’originalité. Prenez «Ron Meatball». D’où nous vient cette comparaison entre le républicain de 44 ans et une boulette de viande?

Si le New York Times se contente d’expliquer sobrement qu’il doit s’agir d’«une allusion à son apparence», le Daily Beast y va plus franchement: DeSantis et une boulette partageraient cette forme «petite et grassouillette», ainsi qu’un certain «manque de prestige social».

Sans oublier que «boulette de viande» est une référence assez crue aux origines italiennes de Ron DeSantis, dont les arrière-grands-parents sont tous des immigrés originaires d’Italie.

«En 2023, personne ne sera moralement indigné que Donald Trump traite un politicien italo-américain de boulette de viande»

– The Daily Beast. –

De ces trois nouveaux surnoms, c’est probablement l’insulte envers les italo-Américains qui passera à la postérité. «DeSanctimonious» était un bon premier effort, mais comprend trop de syllabes – de même que «Shutdown Ron» (un clin d’oeil aux restrictions mises en place par le gouverneur au début de la pandémie). Aucun n’a pas la même résonance que «Meatball Ron».

Voici le nouveau Donald Trump et il est «pire» que l’original

Le temps passe, les surnoms restent

Affubler ses ennemis de surnoms aussi méchants et qu’infantilisants est une étape obligée dans l’agenda politique de Donald Trump. «Crooked Hillary», «Sleepy Joe» (devenu entre temps «Crazy Joe») ou «Crazy Nancy» font partie des plus connus, mais ne représentent qu’une fraction de l’œuvre trumpienne.

«Consciemment ou non, Trump nous nourrit de pépites bourrées d’un énorme pouvoir linguistique»

– Le journaliste Jon Allsop dans la Columbia Journalism Review. –

«Elles font appel à un désir enfantin de faire un conte moral facilement digestible d’un monde compliqué», note en 2017 déjà Allsop dans la Columbia Journalism Review.

«Trump réalise que les campagnes, en particulier présidentielles, ne concernent pas les problèmes – elles concernent toutes les personnalités», note le stratège démocrate Brad Bannon à Roll Call.

Une fois le bon surnom déniché, le travail est à moitié fait. L’essentiel étant qu’ils restent et s’imprègnent dans l’imaginaire collectif. «Hilary la tordue» est plus percutant que «Hilary est tordue», et se glisse dans l’esprit comme une vérité présupposée.

Le pouvoir de la pensée magique

Trump est passé maître dans l’art d’introduire des idées dans les cerveaux du grand public, puis de les répéter encore et encore pour les faire pénétrer. On sait que l’ancien président est un grand adepte de la «pensée magique»: si vous vous persuadez de quelque chose, cela va finir par arriver.

Présenter un évènement comme une réussite est donc tout aussi important que la réussite elle-même. Présenter quelqu’un comme un perdant peut provoquer sa perte.

A voir si Ron DeSantis, alias la «boulette de viande», s’émeut de son nouveau surnom. Situation délicate: «S’il commence à frapper Trump, il va énerver beaucoup les gens dont il a besoin pour voter pour lui», note Tommy Vietor, stratège démocrate qui a travaillé pour Barack Obama, au New York Times.

Ron DeSantis, le rival de Trump, réélu gouverneur de Floride

«Mais si vous êtes considéré comme faible et que vous vous recroquevillez en réponse aux attaques de Trump, cela sera considéré comme un indicateur de la façon dont vous serez perçu.» Et Donald sait mieux que quiconque comment tirer profit des perceptions.

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