Une limite taquinée mais jamais franchie pour le prodige de Nidwald.

«En vitesse, Marco Odermatt skie des courbes dangereuses»

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Ils sont nombreux à louer le talent et le mental de Marco Odermatt. Les Suisses l’admirent, mais qu’en pensent nos voisins français? Nous avons décortiqué le phénomène avec Florence Masnada et Jean-Pierre Vidal.

Lors d’un entretien pour le magazine Red Bull, Marco Odermatt disait que l’une de ses forces, «c’était d’être prêt quand les choses se compliquent». Les souvenirs des Jeux olympiques de Pékin remontent: après sa déconvenue en super-G, il ne lui restait qu’une seule cartouche pour une médaille. La suite de l’histoire, tout le monde la connaît: l’or en géant.

Marco Odermatt, l’apprentissage doré d’un skieur d’instinct

Le grand dominateur de la Coupe du monde ne semble jamais en difficulté, même lorsqu’il pleure sur le télésiège d’Adelboden en 2022, avec la boule au ventre et la peur de décevoir des milliers de fans helvétiques. Tout paraît simple, en apparence, pour le prodige d’Hergiswil – sur le fil du rasoir en seconde manche du récent géant d’Adelboden; stratosphérique lors du super-G de Bormio qu’il survole.

«Marco, on peut lui mettre une paire de skis en bois et il pourrait quand même tout rafler», nous glissait un athlète de Swiss-Ski. Il a cette faculté à tout dégommer, à tout tailler alors que les autres n’arrivent pas à emprunter les mêmes raccourcis. C’est un as des courbes, un instinctif quand il faut tendre les lignes.

Sa première victoire Coupe du monde à Beaver Creek prouve qu’il ose là où les autres ne tentent pas.

Vidéo: YouTube/FIS Alpine

Florence Masnada, ancienne skieuse et consultante pour la chaîne Eurosport, loue les talents du Nidwaldien.

«Sa plus grande force? Il est tellement impressionnant. C’est un mix de travail et de génie. C’est poussé le ski à son sommet»

Pour la Française, «c’est un Federer» par sa décontraction, sa vitesse d’exécution. Une confiance sans faille et un équilibre qui l’est tout autant. «Il a une justesse et une totale confiance. Il est sur le ski intérieur, mais pas trop, et il réussit à garder son pied (extérieur) en dessous de lui pour être bien équilibré», décrit Masnada.

Pour Jean-Pierre Vidal, champion olympique à Salt Lake City en slalom et également consultant pour la chaîne Eurosport, le leader de la Coupe du monde évolue un cran au-dessus physiquement. «Il est très fort avec son haut du corps et use d’une technique maîtrisée par les slalomeurs: il met beaucoup de direction avec son ski intérieur en entrée de courbe.»

Impressionnant en vitesse

Jean-Pierre Vidal se dit même impressionné par le ski produit par Odermatt en vitesse. «Il est très fort en descente et en super-G. Mais il doit faire attention: il tend parfois les courbes qui sont dangereuses.»

En clair, «Odi» est intouchable, il marche sur l’eau grâce à «un feeling exceptionnel», comme le qualifiait l’ex-skieur autrichien Hans Knauss. Florence Masnada se permet même une petite comparaison avec Mikaela Shiffrin: «Ils ont une intelligence musculaire supérieure aux autres. Ils savent quand il faut mettre leurs muscles sous tension», synthétise-t-elle, avant d’enchaîner et de louer «la proprioception phénoménale» du Suisse.

«L’appui est là où il faut, mais cela s’explique aussi par sa totale confiance en lui»

L’année dernière, Bernhard Russi écrivait dans le Blick alémanique qu’Odermatt «n’a jamais rien pris pour acquis. Il se reconstruit sérieusement à chaque course, comme si c’était la première tentative.»

Plus difficile de copier Odermatt que Meillard

Les deux fers de lance de Swiss-Ski, Marco Odermatt et Loïc Meillard, sont souvent opposés. Deux athlètes de la même génération, qui partagent les mêmes sponsors (Longines et Red Bull), jusqu’à se retrouver dans une même série (Bending Gates) produite par la célèbre marque autrichienne. «C’est plus facile de copier un skieur comme Meillard qu’Odermatt. Odermatt est un extraterrestre», confesse Florence Masnada.

Marco Odermatt: «Moi, je ne fais pas semblant d’être décontracté»

Qualifier le pensionnaire du ski club Hergiswil de funambule n’est de loin pas usurpé. Il est tout le temps à la limite, toujours proche de l’irréparable sans partir à la faute. Il ouvre les trajectoires moins que les autres et fait des mètres en moins. Il reste sur la taille du ski sans perdre de vitesse. «Il faudrait calculer à l’aide d’un GPS, ou je ne sais quoi, le chemin qu’il parcourt en moins par rapport à ses concurrents», suggère Vidal.

Pour trouver un élément d’explication, le meilleur exemple est cette courbe absolument démente à Cortina, lors du second super-G. Odermatt prend le virage un voire deux mètres plus à l’intérieur que les autres.

Marco Odermatt lors du second super-G de CortinaLoïc Meillard ouvre bien plus sa courbe, ne parvient pas à tenir sa ligne et sort du parcours Grâce à sa réactivité, Odermatt est capable de rapidement gommer les petites imperfections dues à ses lignes (très) tendues et sans poser un gros travers en entrée de virage. Animé par une confiance et une science (fine) de la courbe, le Nidwaldien ne voit que rarement du rouge une fois la ligne passée, sauf le dossard de leader de la Coupe du monde sur ses épaules.

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